Putain, je suis vénère !
Ce matin, je m’éveille, je ne bouscule personne puisque ma meuf est en vadrouille.
« Ma meuf est en vadrouille », quelle élégance ! On dirait du Titeuf.
Je m’éveille, je fais mes trucs et je tombe sur une annonce du gouvernement. On TV, oui parce que je suis assez con pour avoir une TV dans la chambre. Mais ça c’est parce que y’a pas la place ailleurs. Vous voulez vraiment qu’on parle de la politique de logement de l’infirme dans notre belle république ? Mais je suis con quand même, n’en doutons pas. Une annonce du gouvernement (un spot comme c’est quy disent dedans la téloche) pour prévenir la population sur les risques de contamination au Covid. On y voit le même personnage, un adolescent, qui croise des gens, qui les enlace, des gens qui se serrent la main, se font la bise, etc. « La vie, quoi », comme l’écrirait Beigbeder avec sa verve inimitable.
Puis, l’adolescent fête l’anniversaire de sa grand-mère en famille, il la touche…
Non, il ne la touche pas comme dans vos rêves les plus fous, il lui pose la main sur l’épaule, s’approche d’elle, l’embrasse, « tout çaaaa, quoi » ( comme l’écrirait Beigbeder avec sa verve inimitable), tiavu cousin (comme l’écrirait Kevin des Anges de son stylo bille bleu).
L’adolescent touche mamie, donc. Mais tout le monde touche mamie. Dans le spot, hein !
Tout le monde fait la fête autour de mamie en quelque sorte.
Tout le monde l’embrasse, ils font une photo de groupe, tout le monde touche tout le monde, etc.
Vous avez compris le tableau.
Même si un tableau ne peut se comprendre, « il se ressent » (comme l’écrirait un peintre maudit ou parisien).
Et, soudain, c’est-à-dire séquence suivante, la mamie est à l’hostopital, en urgences apparemment, deux soignants courent à son chevet, le premier dit « elle désature » puis « on la met à 100% d’oxygène ». On comprend bien que y’a un truc qui cloque, hein parce que « désaturer », ça n’a pas l’air d’être très amusant.
Putain, mamie est au plus mal, elle est à l’hôpital, donnez-lui du… vite, un nom de médicament qui se termine en -al !
Et là, tout ce qu’il ne faut pas faire : la dernière phrase d’un soignant (elle est même sous-titrée, on peut l’entendre pour ceux qui entendent et la lire pour ceux qui n’entendent pas) est : « Ça va aller » !
« Ça va aller ». Je pose ça là et je me casse. Putain, alors qu’il est urgent de faire comprendre à des tas de diminués de la conscience et du rachis qu’ils doivent arrêter les contacts et porter un masque pour encore un an – c’est-à-dire 1/80° de leur vie = 1. 25% de leur existence, si je ne m’abuse, on leur demande pas de se couper un bras ou les testicules(1) – ils se sont sentis obligés de terminer leur vidéo – qui ne sert à rien de toute façon, pas plus que leur conneries sur « la drogue qu’est de la merde » ou le port de la ceinture au volant, mais ce n’est pas le sujet, je parle d’intention, pas de résultats – ils se sont sentis obligés de terminer leur vidéo en plaçant dans la bouche d’un soignant un certain « Ça va aller » !
Sans dec ?
Mais…
Mais si « Ça va aller », pourquoi commencer par sensibiliser la population sur un danger ?
La réalité est tout autre : des personnes âgées crèvent à cause de ce virus qui leur fait payer leur âge avancé.
Crever : Fam. En parlant des animaux, des plantes. Mourir. Grâce au poison, tous les rats ont crevé ou sont crevés. Un chat crevé, un oiseau crevé. C’est une médecine à faire crever un cheval. Le froid a fait crever les mimosas. Par ext. En parlant des êtres humains. On l’a laissé crever comme un chien. Dût-il en crever de dépit, je ferai ce que j’ai résolu. Par exag. Crever de soif, crever de faim ou crever la faim, avoir une soif, une faim très vive. On crève de froid dans cette pièce. Il faisait une chaleur à crever. Crever d’ennui, de solitude. Crever de rire, être pris d’un rire irrépressible, rire à en perdre haleine. Perdre la vie.
C’est ça que vous appelez « Ça va aller » ?
Qu’est-ce qui « va aller », finalement ? la marche triomphale de l’humanité jeune, robuste, celle qui entreprend, l’humanité dynamique, qui rêve plus loin que la fiction, celle qui passe à la 5G, l’humanité des start-up, celle qui ne s’embarrasse pas de ses infirmes, ses vieux, ses rebuts, ses erreurs ?
Comme dirait l’autre : OK. Allons-y, prévenons les gens que perpétrer un comportement dans une situation de crise est dangereux… pour personne puisque « Ça va aller ».
Continuez à vous réunir, avec vos vieux et vos « fragiles », pas d’inquiétude, « Ça va aller ».
Pour qui ?
Putain, je suis vénère !

(1) Oh putain, je rêve d’émasculer des cons, c’est mon fantasme number one !

Joomla template by a4joomla