The Thing From Another World, Christian Nyby (1951)
La boucle est bouclée : j’ai vu The Thing From Another Planet, le film original de 1951.
Je ne sais toujours pas – et ne saurai probablement jamais – si le long-métrage est une adaptation fidèle de la nouvelle ou pas, mais peu importe.
C’est un film d’après-guerre (les russes sont immédiatement mentionnés quand un OVNI atterrit sur terre, on sent à peine le Mc carthysme rampant), en noir et blanc, réalisé 31 ans avant le Carpenter, lui-même réalisé 29 ans avant celui de 2011. Amusant, car, comme je le disais pour TT2 (qui du coup devient TT3), l’âge du film justifie le remake, ne serait-ce que pour les effets spéciaux. La Chose est jouée par un acteur grand et balèze, vaguement grimé. Une bestiole humanoïde montrée à deux ou trois reprises. Pas d’idée d’angoisse comme dans TT2 et 3.
Bien entendu, l’horreur de l’époque n’a plus cours et ne réside pratiquement que dans la peur de l’invasion (saletés de communistes !) et dans l’aspect… terrifiant de la musique qui n’a de terrifiant que le peu d’implication qu’a manifestement mis son compositeur à la créer.
Pour moi, le film ne revêt qu’un intérêt très réduit mais, quand on le regarde plus de soixante ans après, avec deux remake dans les pattes, c’est une autre paire de manche.
On s’aperçoit que Carpenter a pris beaucoup de libertés et c’est tant mieux, et que finalement, c’est TT3 qui ressemble le plus à TT1… Tout en collant à TT2.
On n’en sortira pas, remake, préquelle, séquelle, pfiou !
TT1, comme TT3, commence avec la découverte du vaisseau spatial et le rapatriement de la créature avec le glaçon tout autour. Glaçon qui fond dans TT1 pour libérer The Thing, créature qui fait voler le glaçon en éclat pour TT3.
Mais les similitudes s’arrêtent là.
Dans TT1, la chose est comparée… à un légume (une super carotte !) et se reproduit très rapidement grâce au sang mais il n’est jamais question d’imiter une forme de vie, pas dans le sens de Carpenter, en tout cas. C’est apparemment ce dernier qui a introduit l’idée d’imitation cellulaire. Dans TT1, il s’agit de détruire le monstre pour les militaires et l’examiner pour le scientifique. Une opposition toute théorique très en vogue à l’époque. Le film dure 86 minutes, parce qu’il n’y a qu’un embryon de scénario : découverte, compréhension, destruction.
En conclusion, chaque film de la série est très éloquent sur l’époque à laquelle il a été réalisé et c’est un vrai plaisir de comparer les trois. Par exemple, le graphisme du titre date de 1951 !
Under The Skin, Jonathan Glazer (2014)
J’ai vu Under The Skin, ce matin.
On se moque bien de savoir de quel matin je parle, tenez-vous bien !
Presque deux heures que je qualifierais de… âpres mais captivantes.
Under The Skin ne pratique pas le contact avec son public, il reste à distance comme est supposée le faire sa protagoniste principale. Il est de ces films sans concessions, presque égoïste, mise en images de la vision d’un metteur en scène (en l’occurrence adaptation d’un roman).
Le rythme est lent, contemplatif. Un long-métrage qui ne se donne pas, qui nécessite de la réflexion, de l’attention et un vrai abandon sensoriel ; du cinéma, à mes yeux.
Les rares effets spéciaux sont très bien intégrés et ne constituent pas le seul intérêt du film, ils sont un moyen, ce qu’ils devraient se limiter à être en matière de cinéma.
L’histoire n’est pas loin de n’être qu’un prétexte tant le principal est dans les symboles, les ressentis, les sensations, plus suggestif que figuratif. À ce titre, la bande son et la musique sont cruciales et font partie intégrante de la réussite sensuelle du film. Déjà, ça n’est pas de la science-fiction stricto sensu (comme le claironnent les fiches trouvées sur le net) mais, là encore, peu importe.
Le film m’a rappelé Trouble Every Day en plus… anglo-saxon ; anglo-saxon comme l’écriture factuelle de Carver ou Salinger, il montre sans appuyer, sans décrire, sans peser. Et c’est là, à mon sens, le seul bémol que je vois dans mon appréciation du long-métrage. On ne peut que supposer que la créature incarnée par Scarlett se met à éprouver de la compassion (humanité ? émotions ?) en revêtant cette « peau » (le titre) humaine car l’actrice reste impassible du début à la fin et rien – à part ce qu’on peut déduire des fameux faits montrés, aperçus ou devinés, c’est là un des intérêts de la participation active du spectateur – ne suggère qu’elle change, qu’elle éprouve. Or, un film aussi implicite ne peut se contenter de vides pareils.
En un mot comme en cent, on aime ou on déteste.
Il y a fort à parier que celles et ceux qui se sont impatientés en voyant les 3m50 qui suivent le générique (abstraction totale, incompréhensible dans un premier temps), n’ont pas supporté le reste.
A contrario, quiconque aime les singularités, interroger son esprit et ses sens, peut se sentir transporté par ce long métrage.
The Box, Richard Kelly (2009)
Le metteur en scène de Donnie Darko et Southland Tales se propose de revisiter une nouvelle de Richard Matheson, sorte de demi-dieu américon de la nouvelle fantastique courte et auteur hollywoodien prolifique.
Kelly ne respecte guère la lettre de la nouvelle (la chute du texte est à peine évoquée dans le film, de façon anecdotique) et n’en garde que le prétexte fantastique (une boîte à bouton, si tu appuies tu touches le pactole mais quelqu’un meurt) pour l’agrémenter de ses propres thèmes qui rejoignent vite ceux de son précédent film.
La critique voit, sous le substrat fantastique donc, une réflexion philosophique teintée de références bibliques. Le public – il faut situer le film dans son époque – ne cherche que divertissement et scénario surprenant.
Or, Kelly n’a pas le courage de se positionner lors de la fin du film, tout reste à imaginer. Il lâche, à la fois public et critique dans un gouffre d’intentions.
D’un côté, il n’a que deux heures de film pour montrer ce qu’il a extrapolé, ça foire, car le garçon est, certes, ambitieux mais ne s’appelle pas Kubrick. Ce n’est pas qu’un film fantastique. De l’autre, tout est confus, les pistes sont amorcées avec la même intensité, le garçon ne sait pas suggérer, jouer du mystère, il montre sans talent ni personnalité ; au final l’horreur du geste perd son poids philosophique pour s’alléger comme dans un film de SF hollywoodien dans lequel tout n’est plus que spectacle passif.
Et la fin n’en est pas une, bien évidemment…
The objective, Daniel Myrick (2008)
Louons le Seigneur de nous avoir donné les américons !
Petit florilège de la voix off de l’agent de la CIA en Afghanistan :
– Rien n’a changé depuis ma dernière visite : la couleur des uniformes et des soldats est le seul indice qui permette de savoir dans quelle décennie on se trouve.
– Je me demande ce que feraient ces gens s’ils avaient un jour le pouvoir de détruire une nation. Nous autres, il ne nous reste plus qu’à prier qu’ils soient un jour fatigués de combattre.
– Un soldat évoque James Bond devant des afghans. L’un d’eux s’illumine et sourit, comme un enfant à qui on parle de son héros : « Vous connaissez James Bond ? »
– Un soldat conduisant une jeep dans le paysage afghan : « C’est toujours le même paysage ici ; chez nous, au moins, il y a des stations service de temps en temps » !
– Un soldat (le sous-officier) : « Notre mission, c’est de tuer des terroristes, le reste, c’est que de la paperasse ».
– Le sous-officier à un afghan : « Le nihilisme est sûrement une religion pour toi et ton peuple, mais je te laisserais pas n’en faire qu’à ta tête… »
Tout ceci est tiré du film.
Je veux dire que tout cela a passé le filet des censures du monde entier.
À part ça, les producteurs ont voulu jouer la, carte du suspens psychologique plutôt que la débauche d’effets spéciaux et c’est tout à leur honneur. Mais pour cela, il aurait fallu en faire plus que se contenter de mettre une poignée d’hommes dans des décors désertiques et attendre que le spectateur fasse le reste.
Les mots drouille insultante a été inventé par hollywood.
Le premier jour du reste de ta vie, Rémi Bezançon (2008)
114 minutes. On peut en faire des choses en 114 minutes. C’est la durée du châtiment qu’a décidé de nous infliger Rémi Bezançon. 114 minutes passées à suivre la vie insignifiante d’une famille. Insignifiante parce que c’est la vie de 67 millions de personnes en France. Médiocre, commun, identique, rebattu, standard, vulgaire, ordinaire, si ordinaire. On y voit une mère en proie à des questionnements d’une profondeur toute philosophique, a-t-elle toujours vingt ans à quarante, ses enfants peuvent-ils être heureux, etc. Il y a également des jeunes cons de vingt ans qui sont cons comme des jeunes cons de vingt ans et des scènes de la vie de famille plus ordinaire que l’ordinaire. C’est mis en scène de façon ordinaire et en ça c’est cohérent avec le sujet. Cohérent mais commun, comme la vie des gens ordinaires dans leur vie quotidienne. Qui ça intéresse ?
Jeepers Creepers, Victor Salva (2001)
Abusivement sous-titré en français Le Chant du diable, Jeepers Creepers a pour seul mérite d’éveiller la curiosité sur son titre, sorte d’énigme pour les pauvres hères comme moi qui tentent de maîtriser l’anglais et présentent un trouble de rétention des informations.
Le reste, tout le reste, sur 91 minutes, prête à la moquerie.
La mise en scène est insipide, sans idée ni ressort, voire anémiée, digne reflet de la conformité californienne. Et par conformité, je ne parle pas, pour une fois, de blockbusters mais du tout-venant qui ne fait que rêver de Beverly Hills. Cette fourmilière d’acteurs, de petits producteurs et scénaristes qui ne justifie son activité que parce qu’elle lui permet de vivre, tout en nourrissant le mythe du rêve américon. Des gens dépourvus de rêve, sans vision ni ambition autre que pécuniaire et matérielle.
Parce que là encore, avec une histoire et un scénario à peine ébauchés, un prétexte sans queue ni tête et aucune crédibilité, on ne me fera pas croire qu’on peut se satisfaire d’une série B pareille.
Est-il humainement supportable en 2010 de visionner un pauvre film d’horreur des années 80, avec tout ce que cela implique d’effroyablement… raté, mais SANS le second degré ?
Watchmen contre Avatar
J’avais chroniqué le film Watchmen sur le réseau dit social et désormais obsolète (2010) sans l’avoir vu (j’avais dit, en substance, qu’il ne pouvait s’agir que d’un film convenu et prévisible) et un pauvre garçon canadien – je les tiens pourtant en haute estime – m’avait apostrophé de manière véhémente sur le procédé, n’hésitant pas, au passage, à me faire l’insulte de m’associer au peuple français qu’il qualifiait alors d’arrogant.
Je reviens un instant sur cette notion de « chronique en aveugle » (chroniquer un objet artistique sans l’avoir vu ou lu).
Il existe une majorité de biens culturels dont le dessein n’est pas de surprendre, de créer ou d’innover mais de vendre pour faire du profit, que c’est un jeu d’enfant de prédire leur contenu.
Le Seigneur des anneaux, Watchmen, Da Vinci code, Camping, les films « à acteur »… Pas un ne m’a surpris, aucun ne m’a émerveillé et j’ai pu, tous, les chroniquer avant de les voir, pour ce qu’ils sont, des biens de consommation courante qui se contentent de reproduire le plus fidèlement possible l’œuvre originelle (pour les adaptations) afin de ne, justement, surprendre personne, de garder les pieds des amateurs au chaud, ne pas bousculer ce avec quoi ils sont familiers.
Et cela correspond à une demande (conditionnée) des consommateurs : surtout ne pas prendre la moindre initiative, tout doit être conforme, orthodoxe, familier !
Je prendrais un seul exemple :
J’étais inscrit sur une liste de diffusion d’écriture de fantasy et c’était l’époque qui précéda la sortie du premier flim de la trilogie des anneaux. Forcément, les gens de la liste étaient interpelés, lecteurs de Tolkien qu’ils étaient. Et les messages fusèrent. Moi, je m’en balançais, vous imaginez, une production hollywoodienne de plusieurs centaines de millions pour reproduire trois livres d’un auteur médiocre…
Et un de ces messages disait, en substance, que c’était une honte parce que les gobelins (ou les orcs, peu importe) du film grimpaient aux parois alors que ce n’est ab-so-lu-ment pas le cas dans le bouquin. Je me souviens très bien, ma première pensée avait été : « Génial, ça fera au moins un truc original, peut-être que Peter Jackson va me surprendre »…
Auraient-ils (les producteurs, dont Jackson) amassé autant de billets verts s’ils s’étaient approprié l’œuvre et en avaient fait une nouveauté ? Qu’elles auraient été les réactions des amateurs des livres ?
D’où mes chroniques en aveugle, dont voici un fier exemple :
Avatar, James Cameron (2009)
Je n’ai pas vu ce film et je ne projette pas de le faire un jour pour les raisons suivantes.
Je suppose qu’il dure pas loin de trois heures, peut-être plus, c’est le genre de choses qui se fait depuis quelques années et qui ne se justifie que par la surenchère mise en place à hollywood, surenchère dont le but n’est que de conformer un peu plus les moutons qui s’adonnent à ce spectacle en les persuadant qu’ils doivent en avoir « pour leur argent » voire justifier une augmentation du nombre de coupures publicitaires lors des diffusions télévisuelles.
Ce qui me fait penser au même procédé employé dans l’industrie du disque. Il est loin le temps où les disques s’arrêtaient là où l’attention d’un auditeur s’essouffle (quarante minutes), désormais, pour justifier le montant prohibitif des disques, on fabrique des galettes d’au moins cinquante minutes.
Avatar durera donc trois heures, mais comment Cameron parviendra-t-il à les remplir (il ne s’agira pas d’autre chose) ?
Au vu des images, dont il est impossible de s’affranchir tellement la communication d’hollywood est devenue agressive, le réalisateur surfe sur une vague ouverte par spielberg avec E.T et force le trait qui dépeint l’Homme comme une espèce nuisible face à des extra-terrestres parés de valeurs… humaines (l’anthropomorphisme forcené est monnaie courante à hollywood, même dans ses pires contradictions).
Il n’y aura pas de scénario – les personnes les moins bien payées d’hollywood restent les scénaristes – parce qu’un scénario digne de ce nom piquerait la vedette aux effets spéciaux, tout puissants depuis vingt ans du côté de la californie.
On y verra donc des créatures pacifiques forcées de se battre contre un envahisseur humain suréquipé et c’est David qui triomphera de Goliath, le tout sur fond de probable prophétie mystique et surtout de combats épiques.
MAJ des années après : j’ai vu le film, sur mon écran de télévision. J’avais donc raison, je me suis ennuyé comme jamais. Au cinéma, en 3D, je me serais ennuyé de la même façon parce que je ne vais pas au cinéma pour remplacer les sensations d’un manège, mais pour d’autres qui ont été oubliées au fil des évolutions du cours du dollar.
Quant à Watchmen...
Héroïque ou soporifique ?
Ex nihilo, le titre de cet article n’est pas clair. Espérons que la lecture de ce qui suit le rende moins mystérieux.
Les séries américonnes ont envahi… les écrans consentants du monde entier (1). Moi aussi, j’ai baissé les bras et je donne sa chance à une série de temps à autre. Aujourd’hui ou plutôt entre 2014 et 2016, sur divers écrans, à intervalles irréguliers, j’ai vu Heroes.
Pourtant les deux mots série américonne dans la même phrase me font prendre mes jambes à mon cou (pour y faire des nœuds ?), mais cela faisait partie d’une série de concessions ; qui me furent fatales, mais le sujet n’est pas là. Pour un américon moyen (ne serait-ce pas là un pléonasme ?), confronter des individus ordinaires à des pouvoirs extraordinaires est une très belle idée de départ. Sujet maintes fois traité dans la littérature de l’imaginaire mais, comprenons-les, il s’agit surtout d’affubler les personnages de costumes moulants et se rouler avec délectation dans cette mythologie douteuse de cinq décennies d’âge. Bien pour un whisky, trop peu pour une mythologie digne de ce nom. Mais und wennschon ? comme dirait un ex-gouverneur de la ville des angelots. Heroes, ou comment étouffer une idée dans le gras. La série déroule sa cohorte de lieux communs et de clichés pour conditionner les masses. J’enfile mon costume moulant, j’attrape un micro et je me prends pour un journaliste français :
C’est quoi cette série qui étale sur plus de cinquante heures (les 4 saisons) une histoire qui pourrait nous tenir en haleine pendant 10-12 épisodes et nous laisser un souvenir impérissable… plutôt que nous ennuyer après 20 interminables et répétitifs épisodes par saison ?
Un petit coup de futur avec paradoxe ou pas, un retour dans le passé et hop ! on emballe l’affaire, ni vu ni connu, douze épisodes en plus qui n’ajoutent rien !
Tous les personnages doivent faire le choix cornélien, plusieurs fois par épisode, un coup dans le futur, un coup dans le passé ; ça nous fait gravement chuter le cours du choix cornélien sur les places boursières du drame !
Ont-ils battu le record de rebondissement/révélation à la minute ? Si ce n’est pas le cas, c’est que les autres ont triché.
Saison un. La saison un, qui est toujours la moins ennuyeuse, présente une grappe de personnages plus stéréotypés que dans un film de Steven Spielberg, ça rassure les foules. Mais comme ils attrapent tous un super-pouvoir, c’est original. Dans la tête d’un américon. Un truc moyen, comme précisé plus haut.
À partir de ce point, je retranscris une partie de ce que j’écrivis sur un site défunt, parce que ça m’amuse. Surtout la phrase sans trop de ponctuation plus bas.
Saison deux…Oh mon Dieu, ils l’ont fait !
Je m’arrête en plein milieu de l’épisode sept, dégoûté. Par appât du gain (quoi d’autre ? pas la ferveur artistique en tout cas), ils ont recommencé. Après l’explosion nucléaire qui détruit NY (quelle bonne idée, pourtant, raser une ville pareille), c’est le virus qui décime 93% de la population mondiale.
Voyages dans le temps (futur et passé, tant qu’à faire) et rebondissements jusqu’à la nausée – je voyage et je deviens le légendaire héros dont je lisais les histoires (putain, encore une idée que personne n’avait eue en 200 ans de littérature fantastique !) – je voyage et je répare le passé depuis le futur. Ou l’inverse, à moins que… Oui, bon sang, c’est bien ce personnage que tout le monde croyait mort qui reparaît mais qui, oui, est trahi par celle qu’on n’attendait pas pour que l’autre puisse voyager dans le temps et sauver Machin qui, lui, tue son père et cesse d’exister pour que l’agence ait enfin la possibilité de créer le vaccin qui sera détruit par le gars qui revient du futur pour voler le pouvoir du personnage qui est supposé être mort en début de saison X parce qu’il ne sait pas encore que la mère de l’oncle du père de la fille illégitime de Babar n’est pas vraiment morte dans l’accident survenu dans le passé mais que Bidule s’est empressé d’annuler en allant dans le futur délivrer le personnage qui, ô surprise, a changé de bord sans qu’on le sache lors de l’épisode qui n’a pas encore été diffusé que le virus l’a tué, lui et son animal de compagnie qui a mordu les fesses de l’enfant mort-né qui développe ses pouvoirs afin de les offrir à la fille du mec qui pensait être un homme mais qui ne sait plus qui il est depuis le voyage dans le futur qui a altéré sa perception du monde et qui l’empêche de voir le grand méchant qui revient tuer tout le monde parce qu’il est très vilain depuis que le personnage qui voyait dans la tête des gens ne voit plus rien, car le passé a recouvert le futur sans que le présent ne s’en rende compte pour que la famille de Nelson Mandela soit libérée du joug de l’homme sans cape qui peut voyager dans l’espace mais qui ne le fait pas pour pouvoir sauver la planète de l’avidité des hommes qui pourchassent les êtres doués de pouvoirs qui, eux, voyagent dans les livres d’histoire pour arrêter l’histoire, car la fille du nain de petite taille qui devenait tout rouge n’a pas pris son flingue le matin du jour où il a remonté le temps mais, par chance, il le retrouve au moment-même où l’assassinat du directeur de la compagnie qui s’apprêtait à tuer le fils pas encore né de l’union incestueuse de la tante du frère de Jessica et du grand-père de l’oncle de ma sœur qui bat le beurre échoue pour sauver l’humanité de la terrible menace que Pinocchio faisait peser sur l’homme qui absorbe les pouvoirs des autres sans les contrôler, ce qui fait peser une menace sur l’équilibre des forces lorsque la femme qu’on pensait innocente se révèle tirer les ficelles de Polichinelle mais arrête soudain de tirer quoi que ce soit et met la vie de son propre fils en danger, car celui-ci vient d’apprendre que son ami d’enfance complotait dans l’ombre du palmier que le tout premier mutant avait planté dans le désert après avoir voyagé dans le temps pour trouver l’artefact qui sauve le monde.
Vous avez tout lu sans rire ? Alors, vous avez adoré Heroes !
Pas de chance pour moi, j’aime les histoires, pas la logorrhée. Tu m’étonnes que l’auteur original s’est excusé mille fois… Dès la saison deux, on prend les mêmes, on ajoute deux personnages qu’on suit de loin – on garde les mêmes ressorts, on change les noms – on meurt, on ressuscite, on disparaît, on reparaît – on voyage dans le temps pour ajouter une menace – on perd, on retrouve, on chasse des pouvoirs…
Les auteurs ne trouvent rien d’autre à faire que jouer dans le même bac à sable sans jamais apporter quoi que ce soit de neuf. Or, nous le savons tous depuis l'avènement d'internet, un bac à sable, ça finit toujours par puer la pisse...
Ce qui me fait penser à cet argument que beaucoup avancent en faveur des séries, comparativement aux films : « la série permet de mieux connaître les personnages ». Dans Heroes comme dans tant d’autres, on ne connaît pas mieux les personnages, on se familiarise avec eux, ce qui est très différent. De plus, l’argument du changement d’attitude au fil des épisodes ne vaut pas plus ; au mieux, ça démontre l’instabilité de leur personnalité artificielle et binaire. Et puis, ça permet de faire dire à tout le monde « je suis désolé », « je te demande pardon » – oui, étrangement, les américons ont cette élégance qui fait défaut aux français de ne pas « s’excuser » mais de « apologize » – pour ne jamais, ô grand jamais, reconnaître ou assumer leurs conneries/erreurs et, par conséquent, s’autoriser à recommencer.
Saison trois
Discours ouvertement catholique dès le premier épisode qui se poursuit à visage découvert maintenant ! Et le reste reprend tous les éléments pour les triturer dans tous les sens. Pas la peine de refaire le topo, on aura compris. J’ai tenu quatre épisodes puis, j’ai jeté l’éponge.
Je place mes espoirs en toi, lecteur invisible. Si le titre de cette notule est désormais limipide, j’ai réussi ma mission ; je mérite la présence du I de Inbadreams sur mon costume moulant.
(1) Encore une fois, leçon d’estime de soi des québécois qui ont traduit le titre de la série par Les Héros.
Iggy and The Stooges, Les Nuits de Fourvière, Lyon, 14 juillet 2010
Qu’allais-je faire dans un traquenard pareil ? Comme tout le monde, j’allais voir Iggy Pop faire son numéro. Et c’est bien ce qui se produisit, j’assistai à un numéro, celui d’une icône d’un autre temps, coincée dans un monde moderne, accompagnée d’un groupe de grabataires nostalgiques : The Stooges.
D’un côté, à les regarder tous les cinq, on jurerait voir des momies fraîchement animées par un apprenti sorcier. De l’autre, l’artillerie des gimmicks du grand capital capable de tout vous vendre, même la subversion. On rote des fuck, on échange des gestes obscènes avec Iggy Pop, on essaye de toucher la main tendue du messie trash, on sort le téléphone pour immortaliser l’instant et on porte fièrement des tshirts pour un concert à 40 euros ! (sociologiquement parlant, le vivier est infini) Vicious et Strummer s’en retournent dans leur tombe.
L’endroit est inadéquat, le public n’est pas à sa place et, un comble, le groupe lui-même n’a rien à foutre là. Tout est tellement entendu que les chansons qui sonnent déplacées sont celles de Weirdness, pas besoin de connaître le répertoire du groupe par cœur pour l’entendre.
Sur scène, les papys sont chaperonnés comme des enfants qui se bavent encore dans le cou et font défiler les chansons sans prendre le moindre risque. Le set s’appuie sur les titres phares et les musiciens jouent, immobiles, en misant sur la performance du chanteur. Tout se termine avec No Fun (quelle surprise !) et le groupe disparaît sans un regard, mais avec la caisse.
Plus je vois des gens faire du rock sur scène, plus je suis convaincu de la nécessité d’imposer l’algorithme 130 (1 seul album, âge maximum 30 ans et basta !)
Je nous épargne tout le mal que je pense de Weirdness et de Beat em up, sa seule influence malheureuse, c’est mon jour de bonté… Non, je déconne, ce mot n’existe pas dans mon vocabulaire.
Doutes, François Hanss (2021)
Le sujet est, certes, inutile et stérile mais, Doutes est bien un long métrage. Les 68 minutes qui le constituent sont nécessaires et suffisantes. Pas de vide, pas de gras. 68 minutes ramassées en une belle unité de lieu, 68 minutes presque théâtrales avec deux actrices convaincues. Le sujet est percutant et l’angle ingénieux, car il permet, à bien des égards, de tourner comme un polar – ce n’est sûrement pas un hasard si L’Ombre d’Un Doute est cité au début – et d’éviter le prêche social.
Malheureusement la forme est celle de Netflix : monochrome, rien ne ressort, rien ne relève, c’est tout plat. La musique, a contrario, sait se faire discrète et procède par petites touches aussi importantes que le jeu des acteurs, l’exact inverse d’un Hans Zimmer, roi des orchestrations envahissantes.
Le symbolisme adipeux du plan final n’a même pas gâché mon plaisir.
Les Animaux Anonymes, Baptiste Rouveure (2020)
Je n’ai pourtant rien contre les premiers films, les films fauchés, que sais-je mais, comme pour la musique, la virtuosité ou la production ne font pas l’inspiration ni la personnalité.
Sous-titré « Le rapport de force entre l’homme et l’animal a changé », je me pose la question de savoir quelle fut l’intention qui présidât à ce film de Baptiste Rouveure. Film militant ou fantaisie tachée d’hémoglobine, le résultat est… chiant.
M’enfin, quelle est la portée de tous les « et si on te le faisait à toi, hein ? » du monde ? Je veux dire, l’élevage et l’abattage systématiques des animaux est une horreur en soi, depuis des siècles. L’industrie et ses méthodes inhumaines n’ont rien arrangé au problème. Mais, à quoi peut servir, en 2020, un métrage dans lequel les humains sont traités comme des animaux par des animaux (humanoïdes) ? À enfoncer le clou de l’évidence. C’est déjà assez pénible comme ça, Baptiste échoue lamentablement à rendre une copie propre avec ses impuissants fondus enchaînés presque systématiques qui ont tout de l’hésitation de l’étudiant désemparé, pour ne citer que ce défaut agaçant.
C’est en cherchant les références du réalisateur qu’on peut lire qu’il cherche l’expérience sensorielle, notamment avec les bandes-son de ses travaux. De ce côté-là, c’est réussi, la musique est plus mystérieuse que le sujet du film et l’absence de dialogues donne à voir plus que ce qu’il y a sur l’écran. Las ! L’idée est si éculée que l’ennui sort vite vainqueur.